N° 292 - Vendredi 14 décembre 2007  

 
BLUES / A STRASBOURG ET MULHOUSE
 
Bluesman repenti ou pénitent ?
 

Calvin Russell. (Photo DNA - Patricia Vogel)

De passage aussi ces jours derniers à Mulhouse, le Unrepentant tour du bluesman américain Calvin Russell a fait halte l'autre soir à la Laiterie strasbourgeoise. Prestation paisible, mais âme toujours révoltée.
 
Haut de forme noir, bras tatoués, barbichette poivre et sel, visage buriné et creusé par la scène et par la vie, Calvin Russell expose sans fard son caractère de bluesman texan réfractaire.
 
A bientôt soixante ans, celui qui à l'instar de Robert Johnson aurait pu vendre son âme au diable pour son jeu de guitare blues n'a toujours pas cédé aux démons du succès grand public.

L'Amérique boude encore et toujours ce vieux briscard vagabond, pendant que l'Hexagone le bichonne depuis le début des années 90. Nul n'est prophète en son pays !
 
Sur scène, guitare en bandoulière, entouré de son quintet - guitares, basse, batterie, synthé -, Russell égrène sa mythologie américaine sur fond de blues, de rock et de country et chante Free in Freedom, complainte libératrice et dédicace virulente à la politique américaine menée par le clan Bush.
 
Les lumières chatoyantes couvrent le rebelle d'un teint ocre, désert solaire ravivé sur la peau de ce semi-comanche écorché vif, toujours prêt à réclamer le scalp de l'autorité et de l'injustice. Dans la salle, un public entre deux âges écoute sagement les prédications caverneuses de ce guide d'une soirée dédiée à l'affirmation de soi, aux voyages tumultueux, aux renégats et marginaux, à une certaine idée de la lutte.
 
Si Éric Clapton a assagi le blues, l'élaguant de son âpreté originelle par des enregistrements soignés, ce n'est certes pas le cas de Russell, qui en préserve l'âme brute sous une orchestration raffinée.

Vincent Lavigne  

 
© Dernières Nouvelles d'Alsace, édition du vendredi 14 décembre 2007.

Old Jack
17 février 2008